Récit de M. Marcel Jacquemin
Habitant de Sompuis.

 

Le 5 septembre 1914, l’infanterie du 17 ème C.A avait évacué le village. Aussitôt les habitants partent en exode après avoir mis les animaux en liberté, direction le Sud ! Nous irons à proximité de Troyes. 35 personnes restent au village.
Le 14 septembre, je rentre à bicyclette à Sompuis. J’ai traversé sur 6 km le champ de bataille. Au village pas une seule maison intacte. Quelques unes qui paraissent avoir moins souffert ont été traversées par des obus qui ont occasionné de sérieux dégâts.
Les Allemands ont tenu le village du 7 au 10 septembre. Celui-ci fut bombardé par l’artillerie française puis le 10 les Français l’ayant repris c’est l’artillerie allemande qui s’est acharnée avec des matériels de gros calibres.

Les ambulances allemandes ont fonctionné à plein durant la bataille, en particulier à l’école où il reste quelques blessés Allemands. Plusieurs sont morts, d’autres sont atteints de tétanos et leurs plaies gangrenées dégagent une odeur épouvantable. Certains demandent qu’on les achève pour mettre un terme à leurs souffrances. Les derniers seront enlevés le 18 septembre, le chemin de fer venait d’être rétabli. Les Français étaient soignés dans l’église, leur évacuation commença le 14 septembre vers les hôpitaux. Sur tout le territoire de la commune on trouve des traces de la bataille. »

 


Dans les premiers jours de la bataille, il semble que les Allemands ont enterré hâtivement eux-mêmes, une partie de leurs morts. Tant et si bien qu’au bout de quelques jours, lorsque des pluies ont tassé le sol, on voit émerger des pieds ou un crâne décharné.

Au lendemain de la bataille, un groupe important de soldats du 36ème régiment territorial est arrivé, ayant pour mission de rechercher et d’enterrer les morts, de ramasser les armes et l’abondant matériel abandonné partout sur le champ de bataille.



 

 

 

 

En même temps, les civils valides du village, de 15 à 60 ans, sont réquisitionnés pour enterrer les chevaux et les bestiaux et souvent aussi les morts. Quelques uns sont requis avec chevaux et voitures pour transporter en gare les équipements, les armes et le matériel récupérés sur le champ de bataille. J’avais 15 ans et demi et j’ai participé plusieurs fois à ces lugubres corvées qui n’avaient rien d’agréable.

Les militaires du 36ème RIT procèdent à l’identification des cadavres quand celle-ci est possible, car beaucoup, par suite de négligence sans doute, sont dépourvus de plaque d’identité. Très peu d’Allemands sont identifiables. Tous sont enterrés où ils sont tombés

Un an plus tard, en août 1915, la même unité territoriale est revenue avec la mission d’ouvrir les fosses provisoires et de rechercher tous les indices susceptibles d’aider à l’identification. Dans chaque tombe, la liste des corps identifiés ou inconnus est enfermée dans une bouteille cachetée et enterrée au pied de la croix.

En 1920, la guerre terminée, tous les morts ont été regroupés dans un cimetière provisoire (Route de Soudé), à l’endroit même ou l’Etat Major de la 13ème division avait été décimé le 10 septembre1914 (voir Brancardier Chaumartin). Ce cimetière provisoire comportait 500 tombes individuelles françaises et 450 tombes allemandes.

Puis en 1923, lors de la création des grands cimetières nationaux, après restitution aux frais de l’Etat des corps réclamés par les familles, ont été regroupés. Les Français dans le cimetière national de Vitry-le-François et les Allemands dans celui de Connantre.

Extrait des notes de M. Marcel Jacquemin
Habitant de Sompuis en 1914
remerciements M. R. Jacquemin

  Vers 10 septembre